PAysage montagne 4 ultra
© 4 Ultra

Le milieu du trail a lourdement subi la crise sanitaire. Si l’on a souvent mis en avant l’annulation massive d’événements, des petites courses de village aux plus grands rendez-vous mondiaux, d’autres acteurs sont particulièrement touchés en cette période : ceux de la nutrition sportive. Avec les règles édictées par le gouvernement limitant les pratiques sportives, on peut comprendre aisément la perte de vitesse et la chute de la consommation dans ce secteur. On est allé interroger quelques parties prenantes.

J-30 avant l’un de vos objectifs de votre année sportive, un ultra, un maratrail, un 80km où que sais-je encore. Il est leur de commencer à planifier vos ravitaillements, par essentiel de la réussite le jour J. Certains ont leurs habitudes et se tournent vers des choses qu’ils connaissent par coeur : leur barre favorite, la compote de fruit ou de légume qui passera mieux après de longues heures de course, le gel pour se donner un dernier coup de fouet avant la dernière ascension. D’autres aiment le risque et se laisse tenter par des nouveautés qui les font envie. 

Cette routine à laquelle on s’astreint tous plus ou moins n’a guère était suivie en cette année 2020, tant les courses se sont faits rares. Dans ce contexte, la consommation de produits énergétiques a drastiquement chuté, mettant de nombreux acteurs en difficulté.

Chute de la consommation : -70% !

Il y a deux semaines, la Banque de France annonçait des prévisions peu réjouissantes pour l’économie française, tablant sur une chute de 9 à 10% du PIB pour l’année 2020. C’est évidemment l’ensemble des secteurs qui ont été touchés, particulièrement par le premier confinement drastique au printemps dernier. Dans le milieu de l’outdoor, toutes les marques ont été touchées, mais s’agissant des grandes marques de matériel, le rebond a été important dès la fin des restrictions.

Le secteur de la nutrition sportive a semble-t-il suivi la même tendance, mais la crise a été plus intense. Mathieu Parent, fondateur de la marque Fasteur, qui produit des porridges et une boisson d’hydratation pour l’effort, explique : « J’ai constaté un changement énorme de la consommation sur l’année 2020 avec des pics – haut et bas – depuis le premier confinement. » Pierre Cursan qui a créé 4 Ultra, qui confectionne des purées de légumes idéales sur longue distance ajoute : « Le premier confinement a vraiment mis un énorme coup d’arrêt. Plus d’événement, les magasins qui ferment, la règle des 1km/1h, forcément cela a directement joué sur la consommation de produits énergétiques« . 

De manière générale, après avoir discuté avec de nombreux confrères, Pierre Cursan estime une baisse de 70% des ventes pour le secteur, et jusqu’à 90% pendant la première période. « En octobre, j’ai fait un chiffre d’affaires de -78% par rapport à octobre 2019, alors que j’étais dans ma première année d’existence. C’est dire l’impact de la crise sanitaire sur un business comme le mien« .

Une consommation en corrélation directe avec les mesures gouvernementales

Comme souvent dans ce genre de crise, c’est l’effet « dent de scie » qui s’observe, avec de fortes chutes suivies de rebonds parfois aussi forts. La difficulté tient au fait d’amortir les grosses baisses de chiffres d’affaires. Mathieu Parent a bien remarqué cette tendance : « À l’approche du déconfinement et au début de l’été, la reprise s’est faite à 200% pour moi, d’autant que je venais de lancer la nouvelle boisson d’effort. Les compétitions avaient encore lieu, il faisait beau et les restrictions étaient levées, j’étais optimiste ! Puis à l’approche de la fin de l’été (compétitions reportées, annulées, rassemblements limités également) la consommation est redescendue de nouveau. »

Même constat chez Pierre Cursan qui a remarqué une grosse chute dès l’approche du second confinement : « Ça a été difficile d’apprendre le reconfinement, car la tendance semblait plutôt positive pour la reprise. Même si l’année avait été de toute façon mauvaise, on aurait pu sauver les meubles avec un bon dernier trimestre. Le reconfinement nous a remis la tête sous l’eau« .

La critique globale ne vise pas les pratiquants : qui consomme une barre ou tout autre produit énergétique pour sa sortie quotidienne d’une heure dans le kilomètre réglementaire ? Personne ou presque, et cela est bien logique. La multiplication des projets « off » cet été a profité au secteur, mais cela n’est pas venu compenser la raréfaction des compétitions.

Se diversifier, pour résister

Disons-le, il sera difficile pour beaucoup de ces acteurs de résister à la tempête. Mais plutôt que d’attendre le retour hypothétique des événements qui leur permettrait de rebondir une nouvelle fois, certains d’entre eux cherchent à se diversifier. C’est le cas de Pierre Cursan qui explique : « Je vends mes purées de légume dans des magasins de sport aujourd’hui, mais étant donné la typologie du produit, il pourrait être intéressant de toucher un public plus large en étant commercialisé dans les magasins bio (les purées 4 Ultra sont bio et conçues à partir de légumes français)« .

Diversification dit aussi innovation, c’est en tout cas le chemin qu’a choisi Mathieu Parent : « C’est vraiment l’idée de Fasteur de proposer des produits innovants et écouter le retour des clients pour garder vraiment ce qui est le plus apprécié. » Le succès de sa boisson isotonique au sortir du premier confinement a montré l’intérêt d’être en perpétuel mouvement.

Fasteur boisson isothonique
La nouvelle boisson isotonique de Fasteur – © Fasteur.cc

Finalement, nos deux interlocuteurs se rejoignent sur l’avantage des petites structures dans leur situation. « Je loue les locaux et les machines pour produire au coup par coup, cela me permet d’être extrêmement flexible et c’est sans doute ce qui m’a sauvé jusqu’ici » rappelle Pierre Cursan. 

On espère que tous ces acteurs arriveront à garder le cap, en attendant une mer plus calme…

2 Commentaires

  1. Merci Simon pour ce constat édifiant, effectivement nous partageons tous la même galère. La situation en Belgique est identique. Pour des start-ups qui n’ont encore aucune visibilité, le résultat est dramatique. Mais ce n’est pas tout. Nos partenaires sportifs, les clubs et salles de sport, les fournisseurs de biens et services sportifs, souffrent terriblement de cette politique injuste. Alors que le sport est bénéfique pour la santé et le mental, nous sommes tous impacté. Nous pouvons tous agir, que nous soyons colibri, influenceurs ou médias sportifs. Mais il faut agir, vite et maintenant. Puis-je vous inviter à élever nos voix et la porter auprès des décideurs. Appelons à la solidarité auprès de la communauté sportive afin qu’ils soutiennent nos activités. Et surtout, portons-nous tous assistance, soyons solidaires, afin de revenir en 2021 plus forts et plus résignés que jamais pour rebondir.

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